Auteur
Date de parution
Éditeur
Nombre de pages
Birgit Weyhe
6 mars 2024
Cambourakis
Rude girl
Birgit Weyhe réussit l’exploit de présenter en une BD à la fois la biographie d’une femme afro-américaine remarquable, Priscilla Layne, et l’autocritique de sa propre BD, en direct.
Lorsqu’elle propose à la concernée l’autorisation de dessiner sa vie – son enfance et son vécu de personne métisse, ses origines caribéennes, son militantisme skinhead… -, celle-ci le lui accorde, à condition de pouvoir relire au fur et à mesure les chapitres écrits. S’ensuit un découpage très original, et des pages de plus en plus inclusives et perspicaces.
Une réflexion très pertinente sur le genre, la race et la classe, mais aussi sur la culture et le rôle des artistes. Dans une actualité où l’on critique à grands cris la cancel culture et les sensitive readers, Birgit Weyhe et Priscilla Layne nous offrent main dans la main la preuve par l’exemple que l’autocritique et la déconstruction peuvent être une plus-value incontestable à l’art et la littérature.
Auteur
Date de parution
Éditeur
Nombre de pages
Mathilde Ramadier & Elodie Durand
21 août 2024
Futuropolis
144
La Belle de mai
Dans cette bande dessinée aux traits bichromes mais non moins expressifs, nous sommes plongé.e.s à Marseille en 1887. Une des manufactures de tabac de la ville, où travaillent principalement des immigrées italiennes, va devenir le lieu d’embrasement d’une des premières grèves de femmes en France.
Nous suivons Teresa, Sespo et Rosa qui, animées d’abord par l’injustice des fouilles au corps qu’elles subissent à l’usine, vont se retrouver au centre d’une vague de solidarité féminine et émancipatrice qu’elles n’avaient pas prévu. Une belle leçon d’histoire et de sororité.
Un coup de cœur de Mathilde.
Auteur
Date de parution
Éditeur
Nombre de pages
Camila Sosa Villada
19 août 2024
Métailié
224
Histoire d’une domestication
« L’actrice » qu’est notre protagoniste et qui ne sera jamais nommée fut une comédienne mondialement connue, exubérante, excentrique, enflammée… le personnage que tout le monde attend d’une actrice trans en Argentine. Mais il y a peu, elle a chamboulé toutes les prédictions à son sujet : elle s’est mariée (à un homosexuel), a adopté un enfant (séropositif) et ne joue plus sur scène que La Voix humaine de Cocteau. L’histoire d’une domestication traditionnelle… ou bien, paradoxalement, un pas de côté ?
Après Les Vilaines, Camila Sosa Villada nous offre une autre face, complémentaire, de la vie des femmes transgenres en Argentine, toujours avec une maîtrise incroyable autant de ses sujets que de sa plume, jonglant entre violences et joie d’être soi.
Un coup de cœur pour Mathilde, Julie et Caro.
Auteur
Date de parution
Éditeur
Nombre de pages
Carole Lobel
6 septembre 2024
L'Association
224
En territoire ennemi
Déjà fragilisée par sa famille ultra conservatrice qu’elle vient d’arriver à quitter, Carole rencontre en école d’art Stéphane, son prince charmant, qui semble parfait… jusqu’à ce que l’image se fissure. D’incisif il devient virulent ; d’un peu jaloux, possessif ; et de méfiant, il se fait masculiniste et néo-nazi. Les murs se resserrent autour de Carole qui n’a plus que le dessin pour elle (pour combien de temps ?).
Carole Lobel dépeint cette spirale de violence avec une finesse remarquable et un trait très expressif.
Un coup de cœur de Mathilde.
Auteur
Date de parution
Éditeur
Nombre de pages
Richard Flanagan
4 septembre 2024
Actes Sud
288
Question 7
Dans ce récit, Richard Flanagan évoque le terrible camp de travaux forcés d’Ohama (le chemin de fer de la mort) où son père aurait dû mourir si le terrible bombardement d’Hiroshima n’avait pas abouti à la capitulation du Japon. Et cette bombe atomique n’aurait peut-être jamais existé, si un certain H.G. Wells n’avait pas écrit un roman d’anticipation au début du XXème siècle. Et l’auteur ne serait pas né en 1961 en Tasmanie et n’aurait pas voulu s’interroger sur le génocide perpétré par les colons britanniques sur les aborigènes. Et il n’aurait pas failli se noyer à 21 ans et vécu une expérience traumatisante qui lui fit prendre conscience de l’infime frontière entre la vie et la mort.
De ces enchaînements d’événements autour du vivre et du mourir, Richard Flanagan tire un récit aux accents sombres et bouleversants dont se dégage une lumineuse réflexion humaniste et pacifiste. Quant à la « Question 7 », elle vient d’une nouvelle de jeunesse de Tchékov, et je vous laisse la découvrir. Splendide.
Un coup de cœur d’Odile.